Un Traité contre le peuple


Les socialistes ont toutes les manettes et s'ils voulaient prendre le contre-pied des politiques néolibérales - sans surestimer les marges de manœuvre - il y aurait quand même le moyen d'imposer une politique différente. Ils ne devaient pas ratifier ce Traité européen, véritable catastrophe qui va priver la France de toute autonomie budgétaire. Ils l'ont ratifié en se disant que l'Europe va faire une relance.
En réalité, l'Europe ne fera pas de relance car son budget est plafonné à 1,24% de son PIB et il faut l'unanimité des 27 pour déplafonner le budget. En privant les Etats de leur dernier levier d'action, ce Traité donne une arme supplémentaire aux néolibéraux qui veulent casser toutes les « rigidités » sur le marché du travail, minimiser le rôle des syndicats, faciliter les licenciements et en finir avec l'Etat social.
On nous prépare les politiques qui sont en tous points similaires à celles menées dans les années 1930 par Hoover, Laval, Bruning et qui ont conduit l'Europe droit dans le mur. La grande question est : pourquoi Hollande a fait ça alors que tous les instituts de conjoncture annonçaient, après l'adoption du Pacte de croissance, une croissance inférieure à ce qu'elle était auparavant ? Se retrancher derrière ce Pacte est sacrément gonflé car son annonce s'est traduite par des prévisions de croissance en baisse du fait de l'austérité. Et puis, les 120 milliards d'euros injectés en Europe sur quatre ans sont une goutte d'eau par rapport au coût des politiques d'austérité actuelles qui sont de 240 milliards d'euros par an, et avec le Traité, ça va être pire.
On voit mal comment va s'en sortir le gouvernement. Hollande est-il prisonnier de son jeu d'alliances, puisqu'il ne s'est pas appuyé sur une base électorale qui lui aurait permis une affrontement ? Ou alors croit-il que ce n'est qu'un moment difficile à passer : «vous allez en baver pendant deux ans et ça ira mieux après» ? Difficile à croire car il est évident que cette politique va échouer.
Et pourtant, les solutions existent.

A court terme, changer le mandat de la BCE permettrait de sortir de la question des dettes publiques. Les marchés financiers ne sont pas efficaces, il faut arrêter de leur confier la dette publique et la faire garantir par la BCE, ce qui ferait chuter les taux. Bien sûr, les néolibéraux crieraient au retour du marxisme. Et pourtant, c'est ce que font ces grands communistes que sont les Américains, les Anglais et les Japonais.
Les taux sur la dette américaine à dix ans sont à moins de 2%. Les Japonais ont une dette publique qui s'élève à 200% du PIB et ils financent leur dette à dix ans à 2%. A court terme, ça éteint l'incendie des dettes publiques. Certes c'est difficile, ça demande une négociation, mais c'est la voie de la raison. Même Juppé et des gens du précédent gouvernement l'avaient reconnu.
Il faut ensuite stopper d'urgence les politiques d'austérité qui enfoncent les pays dans la récession et préparer un plan de reconversion écologique de nos économies qui créerait des milliers d'emplois. Une économie keynésienne avec une production écologique. Et bien sûr, reprendre la main sur les marchés financiers. On a vu à quelle catastrophe ils nous ont conduits, il y a des milliards qui circulent et qui changent de poche à la vitesse de la lumière. Les marchés ne sont pas rationnels : la dette les inquiète, ils demandent plus d'austérité
puis ils s'inquiètent pour la croissance car ils ont peur de ne pas être payés. Si l'austérité se traduit par une perspective d'accumulation des déficits, ils ne sont pas rassurés du tout. Or, c'est ce qui est en train de se passer.

Indépendamment de tout cela, les décisions de Hollande ont été profondément antidémocratiques. Alors que l'esprit du Traité était extrêmement clair sur le fait que c'était une disposition constitutionnelle, il a joué sur certaines formulations pour obtenir qu'il n'y ait pas de modification de la Constitution, première argutie.
Deuxième argutie, à en croire les sondages, il y avait une majorité écrasante de gens prêts à voter contre s'il y avait eu consultation. Donc on passe outre à la volonté des peuples et on impose des choses dont on sait très bien que, comme par le passé, elles ne vont pas marcher et que ce n'est pas sous une forme durcie qu'elles marcheront dans l'avenir.
Les élites n'accepteront des changements que s'ils leur sont imposés. Seuls, donc, les mouvements sociaux peuvent changer les sociétés, d'où la nécessité de la bataille des idées pour armer les citoyens.

Il est temps de transformer cette société. La transformation se fera au prix d'une révolution des consciences, d'une révolution des pratiques qui restituera le bénéfice des richesses à ceux qui les créent et non à ceux qui les exploitent, d'une révolution qui rendra le pouvoir au peuple, ce qui est la définition même de la démocratie.

Daniel

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