Intervention du groupe Front de Gauche au Conseil Général 54

Session du 15 novembre 2012: DOB (débat sur l'orientation budgétaire)


Monsieur le Président, mes chers collègues,

Notre DOB, prélude au BP 2013, se déroule dans une année de transition après la défaite nationale de la droite que nous appelions de nos vœux et l’arrivée d’une majorité socialiste et verts envers laquelle les attentes sont immenses et dont les débuts alimentent, vous le savez, de vives inquiétudes de notre part.

Il y a une donnée qui pour l’instant n’a pas évolué depuis quelques années, la crise économique, devenue sociale et systémique partout en Europe et qui touche durement nos populations.

Les analyses concernant cette crise sont nombreuses et varient selon le positionnement politique de chacun. Pour notre part, élus Front de Gauche, nous continuons à affirmer que le chemin pris par l’Europe et donc par les pays qui composent l’union, n’est pas le bon.

En signant un traité européen reprenant les termes de l’accord Sarkozy-Merkel, nous condamnons nos pays à mener des politiques de rigueur qui tournent radicalement le dos au retour souhaité de la croissance et aux évolutions positives attendues par nos peuples.

Hier dans des formes et des proportions jamais vues jusqu’ici, la colère et le refus de ces politiques de régressions sociales et de récessions économiques se sont exprimés à travers l’Europe !

Du fait de ces politiques, nous nous trouverions donc condamnés à respecter des critères d’équilibres financiers qui obligent l’Etat à mettre en place des plans drastiques d’économies dans son propre budget et de fait, de mettre à contribution des collectivités territoriales déjà laissées exsangues par le quinquennat de Nicolas Sarkozy.

Monsieur le Président, si nous montrons des signes tangibles d’inquiétude face à la politique nationale déployée actuellement, c’est parce qu’elle nous parait en total décalage avec les espoirs suscités en Mai dernier. Qu’en est-il de la condamnation unanime de la loi HPST, de la tarification à l’acte pour l’hôpital, du rejet affirmé de l’augmentation de la TVA dite « sociale », du gel des barèmes de l’impôt sur le revenu, des franchises médicales, des licenciements boursiers de la lutte contre les finances et de la défenses des salariés.

La présentation récente de ce qui a été intitulé de « pacte de compétitivité », les dispositions préconisées par le rapport Gallois inspiré par le cénacle libéral des plus actifs ces derniers temps, s’appuient et alimentent l’idée de la fatalité de la crise, en inversant dramatiquement une donnée, un concept fondateur de notre démarche, de notre engagement individuel et collectif :
Le travail n’est pas un coût pour la société, il en est la seule richesse ! la question cruciale et qui sans doute n’a jamais été aussi déterminante c’est celle de son partage, des nouvelles manières de la produire !
Nous comprenons que le MEDEF se félicite d’avoir été entendu, nous partageons aussi la stupeur d’élus de la majorité nationale, qu’ils appartiennent aux Verts ou à la gauche socialiste.

20 Milliards d’exonérations fiscales pour les entreprises compensés par 10 milliards supplémentaires d’économies sur le budget de l’Etat, une augmentation des taux de TVA ou encore des prélèvements sur les retraites ne sont pas à proprement parler ce qu’on pouvait idéalement attendre d’une gauche après 10 années de pouvoir de droite.

Alors certes, il convient de rappeler que cette situation, catastrophique, est héritée de la casse sociale systématique mise en œuvre par de trop longues années de pouvoir de droite. Mais nous avons trop clairement condamné le plan de  rigueur Fillon pour ne rien dire aujourd’hui alors que se préparent des mesures bien plus douloureuses qui obéissent certes à une logique, mais à une logique qui n’est pas la nôtre et qui est tant éloignée des situations difficiles que vivent beaucoup de nos concitoyens.

La recherche d’un hypothétique compromis historique entre ceux qui portent la responsabilité de la crise et ceux qui en sont victimes ne profiterait qu’aux puissances d’argent.

Nous souhaitons ardemment et agissons pour que s’éloigne le spectre de l’échec qui accompagne ces logiques.

La situation des collectivités territoriales, la nôtre pour ce qui nous concerne aujourd’hui, est directement le fruit des décisions du précédent gouvernement, qu’il s’agisse du déséquilibre abyssal entre le coût pour le département des allocations individuelles de solidarité (AIS) et les compensations versées par l’Etat ou encore du gel des dotations d’Etat aux collectivités.

Pour autant, une fois cela affirmé, il nous revient de continuer à porter les mêmes exigences auprès du nouveau gouvernement.

Nous continuons à soutenir pleinement l’action du Président pour résoudre la question des AIS et nous savons, il l’a rappelé lors du discours d’ouverture de cette session, qu’il ne faut pas compter sur lui pour faire de la figuration dans les discussions sur les modalités de compensation qui devront voir le jour en 2014. Il a pu, peut et pourra compter sur notre soutien dans cette action résolue et salvatrice !

Mais pour le moment, nous savons que l’ADF n’a obtenu en fond de secours que 170 millions sur les 400 demandés et que cette aide est conditionnée à la mise en œuvre de politiques partagées avec l’Etat. Curieuse demande de contrepartie de la part de l’Etat qui dans le cas présent, est un débiteur du département, s’agissant d’allocations payées par nous et relevant, comme nous l’avons toujours dit, de la solidarité nationale.

Néanmoins, vous nous avez indiqué que ces 170 millions seront répartis à partir d’un diagnostic partagé Etat/département selon les besoins de chacun et sur des critères objectifs. Nous espérons que les départements qui, comme nous, ont effectué des efforts particuliers de bonne gestion ne se verront pas exclus du dispositif de secours.

Si nous attendons beaucoup des discussions à venir, c’est bien entendu parce qu’elles conditionnent les capacités de notre collectivité à retrouver des marges de manœuvre et à continuer à animer un projet départemental qui a fait ses preuves depuis 1998. C’est aussi parce qu’à ce jour, la seule certitude que nous avons, c’est la baisse programmée sur les prochaines années des dotations d’Etat aux collectivités locales à hauteur, au minimum, d’1,5 milliards et jusqu’à 2.25 milliards selon certaines projections.

Le fait que les propos du 1er ministre aient porté explicitement sur les collectivités territoriales concernant un effort envisagé de 10 milliards ne peut alimenter que de fortes inquiétudes.

De telles orientations sont dans la droite ligne de ce qui est imposé par le traité européen, mais chacun doit mesurer la gravité de leurs conséquences économiques lorsque l’on sait que 70% des investissements sont le fait de commandes des collectivités…

Nous réclamons depuis des années une grande réforme fiscale, celle-ci a été promise par le candidat Hollande lors de la présidentielle. Peut-être que le nouvel acte de décentralisation en cours de gestation permettra d’y arriver. Peut-être aussi que les recherches de solutions concernant les AIS permettront une adaptation fiscale en réponse. Nous souhaitons pour notre part que si solution fiscale il devait y avoir, elle s’appuie sur une assiette nationale et sollicite plus la finance que le travail et qu’elle établisse enfin des règles dynamiques de péréquation. Ne persistons pas dans le schéma qui a conduit à ce que les collectivités les plus pauvres qui concentrent les populations les plus en difficulté et qui ont donc le plus besoin de financements soient obligées de taxer plus fortement leurs populations.

Nous attendons aussi beaucoup de la décision d’associer les départements à la grande réforme de la dépendance, en réaffirmant le vœu de voir enfin émerger un véritable 5ème risque pris en charge par la sécurité sociale et assis sur un financement public national.

Nous avons conscience que les exigences que nous portons sont difficiles à satisfaire dans le cadre imposé que j’ai eu l’occasion de rappeler.

Elles nous paraissent néanmoins nécessaires à rechercher. Nécessaires pour permettre la mise en œuvre sereine du plan collège que nous avons approuvé ensemble. Nécessaires aussi pour permettre à notre collectivité de continuer à mener des politiques ambitieuses en matière de solidarité, ces politique là, monsieur le Président, mes chers collègues, sont des marqueurs essentiels des politiques progressistes mises en œuvre depuis 1998 et qui ont valu à plusieurs reprises au conseil général de Meurthe et Moselle de se distinguer au niveau national par rapport à d’autres collectivités qui se contentaient de gérer. C’est aussi là une différence que nous avons cultivée depuis toujours par rapport à d’autres, jamais nous n’avons accepté de devenir une collectivité qui n’aurait plus qu’à distribuer des aides entrant dans un canevas fixé ailleurs. Toujours nous avons eu à cœur d’inventer des politiques et des dispositifs innovants.

Nous sommes ici dans le cadre d’un débat d’orientations budgétaires, les questions qui sont posées dans le rapport pour sa partie « choix de responsabilité à mener » sont toutes pertinentes mais les réponses ne peuvent avoir un sens qu’avec l’ensemble des pièces du puzzle financier.

Au-delà des interventions à caractère général, exercice imposé pour chaque groupe politique de notre Assemblée, vous avez raison de dire que tout peut être exprimé, par chacun,  en matière de contractualisation avec les territoires, de transport et plus globalement sur chaque politique menée par le département. Il reviendra ensuite à l’exécutif départemental de prendre ses responsabilités et d’expliquer ses choix en Décembre prochain, avec vous nous nous y emploierons !

Ce débat se déroule dans un cadre connu : préservation de notre autofinancement par un recours mesuré à l’emprunt et une maîtrise des dépenses de fonctionnement rendue obligatoire par le poids des AIS d’une part et par le blocage des leviers fiscaux s’il fallait encore une fois rappeler l’héritage Sarkozy.

En prenant acte des orientations contenues dans le présent rapport, nous indiquons rester vigilent quant aux décisions nationales à venir qui, nous le savons tous, conditionneront grandement les possibilités de libre administration de notre collectivité.

Je vous remercie,



André CORZANI
Président du groupe FDG

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