L'austérité, ça suffit!

L'austérité, ça suffit !

Erigée en dogme par les néolibéraux, la politique d'austérité aurait-elle du plomb dans l'aile ?

Une chose est sûre, ses tenants ont du faire face à deux démentis cinglants concernant sa prétendue efficacité.

Le premier par l'économiste en chef du FMI qui a admis que l'utilisation d'un mauvais coefficient de calcul avait abouti à une sous-estimation des effets négatifs de l'austérité et que les coupes budgétaires avaient des effets récessifs. Bref, que l'austérité tant vantée est un remède pire que le mal.

Le second coup dur, la fameuse « loi » que Reinhart et Rogoff, deux « éminences » de Harvard, qui voulait que dans 20 pays développés, la croissance de la dette au-delà d'un certain niveau (90% du PIB) ait un effet récessif. Une vaste fumisterie car l'étude était truffée d'erreurs et d'oublis, et certains calculs étaient faux. Une autre étude l'a d'ailleurs confirmé, en donnant un taux de croissance à + 2,2% pour les pays endettés à plus de 90% contre – 0,1% selon la loi des deux « éminences ».

Le problème est que les libéraux ont vanté l'excellence d'une « recherche sérieuse » et s'en sont servis pour imposer de nouvelles purges aux peuples européens. Comme le dit Paul Krugman, prix Nobel d'économie : « Les pays européens qui ont imposé une forte austérité ont connu d'important revers économiques ; plus l'austérité a été dure, plus les revers ont été importants »



Les dégâts sont en effet considérables. Depuis 2009, la Grèce a subi sept plans d'ajustement budgétaire. Résultat, le pays connaîtra en 2013 sa sixième année consécutive de récession.
Le taux de chômage est passé de 7,7% en 2008 à 27,2% en janvier 2013 et atteint 59,1% chez les moins de 25 ans. Le plan drastique de la « troïka » (commission européenne, FMI et BCE) fera monter la dette à 175% du PIB alors que ce fameux plan avait été déclenché à 130%.

La situation n'est guère meilleure en Espagne et au Portugal qui voient leurs taux de chômage s'envoler, 26,2% pour l'Espagne et 17,5% au Portugal. L'austérité appliquée à peu près partout en Europe produit toujours les mêmes résultats : baisse de l'activité, chômage massif, montée de la dette, souffrances et accroissement des inégalités et de la pauvreté. De plus, loin de remettre l'Europe sur les rails de la croissance, la priorité absolue au redressement des finances publiques a plongé le continent dans le marasme. Elle a coûté plus de 3 points de PIB en France, 4 au Royaume Uni, 7 au Portugal, 12 en Grèce et 3,5 dans la zone euro.

La zone euro connaîtra donc en 2013 sa deuxième année de croissance négative et une nouvelle envolée du chômage, soit 19,2 millions de chômeurs dans ses 17 pays. Des voix s'élèvent et la contestation grandit. Y compris parmi certains gouvernements. Ainsi, en avril dernier, les Pays Bas ajournaient 4 milliards d'euros d'économie budgétaire alors que la cour constitutionnelle du Portugal censurait des mesures d'austérité d'un équivalent de 1,3 milliards d'euros.

Reste qu'il serait faux d'affirmer que les dirigeants européens ont renoncé à l'austérité et partout, coût du travail, compétitivité, réduction des déficits restent à leurs yeux les seuls leviers pour sortir de la crise. Malgré tout, cela a au moins le mérite de relancer le débat. Symptomatiques de cette évolution, les déclarations du président de la Commission européenne, qui reconnaissait fin avril que cette politique avait atteint ses limites. Ce qui l'a conduit à infléchir sa politique en annonçant le 3 mai dernier un changement de rythme et un assouplissement dans le retour à l'équilibre exigé des partenaires européens. La France et l'Espagne auront donc deux ans supplémentaires pour passer sous la barre prétendument fatidique des 3% de déficit.

Mais ce délai accordé à la France ne va pas sans contreparties, et cela se traduira par un
donnant-donnant qui troquerait un ralentissement du rythme de réduction des déficits contre une accélération des réformes dites structurelles. Celle des retraites, par exemple, qui se traduirait, si nous les laissons faire, par de nouveaux reculs exigés par le Medef et les marchés financiers.
Egalement le pacte de compétitivité et l'ANI, un nouveau coup dur pour le monde du travail.

Autant de mesures dont on voit mal en quoi elles seraient susceptibles des créer de la croissance.
La demande interne européenne s'est contracté de plus de trois points et demi de PIB de puis 2010 et l'investissement des entreprises n'a cessé de reculer. D'où un nécessaire changement de cap. Elles peuvent accumuler les profits mais sans perspectives de demande, pas d'investissements, et sans investissements, pas d'emplois.

Et l'extension de la flexibilité n'y changera rien car les trois décennies de gains de flexibilité engrangés par les entreprises n'ont pas permis de remettre sur pied une économie créatrice d'emplois, bien au contraire.

Idem pour la compétitivité, un maître mot du Medef. Le commerce extérieur des états européens étant pour l'essentiel intra-européen, la demande intérieure des uns est fonction de la demande intérieure des autres. On le voit pour la grande championne allemande qui commence à avoir des vapeurs car ses clients du sud de l'Europe s'appauvrissent et achètent moins.

De plus, les stratégies de compétitivité sont des stratégies non coopératives qui replient les pays sur eux mêmes alors que l'Europe a besoin de solidarité.

Il faut donc construire une alternative et revoir la logique de la construction européenne. Il faut rompre avec la contraction de la demande intérieure et la concurrence au moins disant social.

Il faut militer pour une stimulation de la croissance et de la demande par une hausse des salaires et la promotion d'emplois de qualité et durables. Revaloriser le travail et remettre les salariés au coeur du système et non les actionnaires gloutons.

Daniel
Section de Nancy

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