Une cure d'austérité

Une cure d'austérité


Malgré l'échec de la politique d'austérité qui enfonce des pays européens dans la récession permanente et malgré la débâcle du Parti socialiste aux élections municipales, ne tirant aucun enseignement ni de l'un, ni de l'autre, Manuel Valls a l'intention d'infliger aux Français une nouvelle purge libérale.
Pour plaire au Medef, aux marchés financiers et à la commission européens, le premier ministre a annoncé 50 milliards d'économie : 18 milliards sur le budget de l'Etat, 11 sur les collectivités territoriales, 11 sur les prestations sociales et 10 sur l'assurance maladie. L'objectif étant de faire passer le déficit public sous la barre strictement comptable des 3% du PIB en 2015.
Les 5,2 millions d'agents de la fonction publique continueront à voir leurs salaires gelés jusqu'en 2017, les collectivités locales verront leur budget réduit à peau de chagrin, l'assurance maladie devra une fois de plus réduire ses dépenses sur le dos des assurés sociaux et les prestations sociales (retraites, famille, logement …) ne seront pas revalorisées jusqu'en 2015. Seul le RSA (sauf sa revalorisation exceptionnelle qui n'aura pas lieu) et le minimum vieillesse seront épargnés.
Un plan qui ne relancera pas la croissance et l'emploi. Ce ne sont pas les exemples qui manquent pour le prouver. Et ce n'est pas en réduisant le pouvoir d'achat des ménages que la demande augmentera et que les carnets de commandes des entreprises se rempliront.
Un autre objectif de M Valls est de baisser le « coût du travail » en éludant bien sûr le surcoût du capital qui ruine les entreprises et l'économie. Il reprend à son compte la rengaine du grand patronat et des gouvernements précédents sur la compétitivité des entreprises. Et si l'économie française souffre d'un déficit de compétitivité, c'est bien parce que la répartition de la valeur ajoutée est de plus en plus favorable aux actionnaires au détriment des salariés et de l'investissement. Réduction de l'emploi et du pouvoir d'achat, dévalorisation du travail, précarisation massive du salariat participent au rétrécissement du marché et profitent au capital en quête d'une rentabilité plus alléchante dans les activités financières.
L'ambition du nouveau premier ministre est de réduire le « coût du travail » de 30 milliards d'euros d'ici 2016. Pour ce faire, il reprend les vieilles recettes libérales en matière d'exonérations sociales et fiscales accordées aux entreprises dont les résultats sont médiocres par rapport à leur coût pour le pays. Cet argent public servant surtout à augmenter des marges qui profitent à la rémunération du capital, donc aux actionnaires. Elles sont également des trappes à bas salaires et incitent les employeurs à payer les salariés au Smic.
L'allègement prévu revêt une ampleur inédite. Les cotisations patronales seront entièrement supprimées au 1er janvier 2015 au niveau du Smic, les cotisation familles seront abaissées de 1,8 points au 1er janvier 2016 et pour les travailleurs indépendants, M Valls prévoit une baisse de 3 points de ces cotisations dès 2015.
En outre, l'impôt assis sur les résultats des sociétés devrait baisser d'ici 2020, avec un première étape en 2017.
La contribution sociale des entreprises ayant une activité dans le secteur concurrentiel et avec un chiffre d'affaires d'au moins 760 000 euros HT sera supprimée.
Avec le CICE et maintenant le Pacte de responsabilité, le gouvernement renonce à une politique industrielle ambitieuse pour lui préférer une stratégie libérale : augmenter le profit des entreprises en arrosant large, baisser leurs contraintes en espérant qu’elles voudront bien un jour relancer l’emploi, la production et l’investissement en France. Tous ces milliards de cadeaux alors qu'aujourd'hui, le gouvernement refuse de nationaliser Alsthom pour empêcher la braderie d'un des fleurons de l'industrie française.
M Valls annonce un « pacte de solidarité » qui exonérera les salariés payés au Smic de cotisations pour la Sécurité sociale. Cette mesure concernera, mais de façon dégressive, les salariés payés jusqu'à 1,5 fois le Smic. Elle coûtera cher à la Sécu et le capital sera toujours épargné
Les arguments en faveur de la baisse des cotisations sociales comme moyen de lever les freins à l'embauche, de créer ou sauvegarder des emplois sont essentiellement théoriques. Il n'y a guère d'arguments empiriques pour considérer la baisse du coût du travail comme un instrument pertinent de politique de l'emploi. Les évaluations de vingt ans d'exonérations de cotisations sociales employeurs sur les bas et moyens salaires tendent à démontrer que leurs effets sur l'emploi sont de portée limitée au regard de l'ampleur des montants engagés.
L'idée que les cotisations sociales employeurs n'ont pas de raison d'être n'a pas de bases économiques solides. Les cotisations familiales sont un instrument de politique familiale, et il n'y a pas de raison d'éliminer toute contribution des employeurs à la reproduction sociale des travailleurs, car cela fragilise le financement de la branche famille. La baisse du coût du travail, et a fortiori celle des cotisations sociales employeurs famille, ne peuvent tenir lieu ni de politique de l'emploi, ni de politique industrielle.
Le grand patronat est donc satisfait et le Medef jubile. Son chef Gattaz demande d'aller vite et d'inscrire le Pacte dans la loi avant l'été, les chefs d'entreprises seraient nerveux – selon lui. Il se réjouit de la baisse du « coût du travail »et de la fiscalité qui ne profite qu'aux grands patrons et aux actionnaires gloutons. Il applaudit des deux mains la baisse des dépenses publiques, des budgets de solidarité et des services publics dont les entreprises bénéficient aussi. Sachant que le premier ministre l'écoute, il en veut toujours plus. Sa prochaine exigence : supprimer le droit du travail qui entraverait l'économie. Et le Smic ...
Il faut absolument changer de cap et il existe des alternatives.
Notamment augmenter les salaires et pensions pour tirer l'économie vers le haut. Il faut une remise à plat des aides publiques accordées aux entreprises afin qu'elles soient évaluées en fonction de leur efficacité économique et sociale. Il faut que les salariés avec leurs élus participent à la vie de l'entreprise et aient leur mot à dire. Il faut également impulser un sursaut industriel en élargissant notamment les capacités d'action de la Banque publique d'investissement et préparer la transition écologique qui créera des centaines de milliers d'emplois. Pour ce faire, il faut rompre avec le libéralisme, en finir avec la politique d'austérité et utiliser l'argent public à bon escient. C'est à dire au service de l'intérêt général et non d'une minorité qui exploite les richesses créées par le monde du travail.
Cela passe par la mobilisation du peuple et l'amplification des luttes.


Daniel
Section de Nancy